La dépression

La dépression est un état d’abattement sévère et durable. Le dépressif est triste et découragé. Il n’a plus de courage, d’énergie, d’élan vital. Il se sent vide et sans valeur. Sa vie n’a plus de sens. Il n’a plus envie de rien. Il peut aussi souffrir de troubles psychosomatiques, du sommeil ou de la concentration, ainsi que d’une perte d’appétit et d'une moindre résistance aux infections.

 

Quelles en sont les causes ?

La dépression peut apparaître progressivement, avec une fatigue, une morosité et une perte d’envie qui ne cessent d’augmenter, ou brutalement. Dans ce deuxième cas, on parle de "burn-out", quand l’état psychique de la personne s’effondre soudainement, qu’elle ne peut plus se lever le matin et qu’elle est anéantie du jour au lendemain.

La dépression peut survenir à la suite d’un deuil ou tout autre événement extrêmement douloureux. Ce n’est alors pas une maladie à part entière, mais une réaction normale. Elle est généralement transitoire et plus facile à traiter, ce qui ne signifie pas qu’elle doive être minimisée. La personne qui en souffre doit être soutenue comme n’importe quel dépressif.

Lors d’une petite déprime ou d’une véritable dépression, qui n’a pas entendu : « Mais enfin, secoue-toi ! Tu as tout pour être heureux-se ». Je l’entends de la bouche même de mes patients : « J’ai tout pour être heureux-se et je n’y arrive pas ». Soyons logique : si une personne déprime, c’est qu’elle n’a pas tout pour aller bien et encore moins pour être heureuse. Mais que lui-manque-t-il alors ?

J’ai souvent l’impression que ce qui manque à une personne, notamment à haut potentiel puisqu’il s’agit de l’essentiel de ma patientèle, c’est la force mentale, la capacité de se sentir aimée et d’être sereine.

Dès la naissance, un enfant est plus ou moins résilient, confiant envers la vie et les autres. Après chaque épreuve, il pourra, ou non, tourner la page, sans se laisser perturber durablement par l’événement, que ce soit un deuil ou une simple déception. Nous ne sommes pas équitablement dotés en « force mentale », en capacité de rebondir et d’aller bien coûte que coûte. Il suffit de regarder les nouveaux-nés : certains sont sereins alors que d’autres pleurent sans cesse. Pourquoi ? Il y a sans doute, à cela, des causes génétiques et congénitales, par exemple un stress important de la mère pendant la grossesse. Quelles que soient les causes, un enfant nait avec un terrain qui peut le prédisposer à être un jour dépressif, terrain qui sera ensuite influencé positivement ou négativement par son vécu.

Se sentir aimé n’est pas une capacité innée. Elle est même très peu développée chez certaines personnes, notamment celles qui ont une mauvaise estime de soi et qui se dénigrent. Pourquoi les autres ne verraient-ils pas leurs défauts et les aimeraient-ils ? Les personnes hypersensibles, également, pensent, à tort, que chaque réflexion révèle que les autres les jugent mal et ne les aiment pas. Or, comment aller bien quand on ne se sent pas aimé ?

Enfin, certaines personnes, dès la petite enfance parfois, sont très anxieuses alors que d’autres savent profiter de l’instant présent et relativiser, sans toujours focaliser sur le négatif et s’inquiéter pour tout et rien. Être sans cesse soucieux et anticiper ce qu’il pourrait arriver de désagréable ou dangereux, n’aide certes pas à aller bien.

 

Johann HARI a parcouru le monde pour interroger des chercheurs qui se sont intéressés aux causes de la dépression et observer les comportements humains pour en déduire ce qui permet de se sentir bien. Il liste neuf causes de dépression en précisant qu’elles ne sont certainement pas exhaustives.

Les causes sont différentes d’un malade à l’autre, souvent multiples et rarement liées à un manque de sérotonine dans le cerveau, comme les laboratoires pharmaceutiques aiment à le faire croire, dans le but inavoué de vendre leurs médicaments. D’après Johann HARI, les causes possibles de la dépression sont : 

Un travail qui ne convient pas, qui ne permet pas de s’épanouir ou qui place dans une position de domination : la personne manque d’autonomie et ne peut pas donner son avis. Bref, elle ne compte pas.

La solitude, quand la personne est effectivement seule ou que, bien qu'entourée, elle se sente tout de même seule et incomprise. Alors que l’être humain est un animal social qui a besoin du groupe, de relations d’entraide et de soutien émotionnel, nous vivons aujourd’hui de plus en plus centrés sur nous-mêmes, chacun chez soi, ce qui peut sans doute expliquer l’épidémie de dépression dans nos sociétés modernes. La dépression est une sorte de deuil, celui des liens que nous avons perdus. Dans les sociétés trop individualistes, les risques de dépression sont plus importants. Le fait de penser collectif, de se soucier des autres, de vouloir aider protège de la dépression.

Les valeurs mal choisies. La société et la publicité incitent à valoriser la possession de biens matériels et l'apparence, au lieu de valoriser les rapports humains et ce qui a du sens. J’ai rencontré des patients qui avaient fait un burn-out, dans une entreprise où ils se sentaient pourtant bien, alors qu’ils aimaient leur travail et avaient de bons rapports avec leurs collègues. Alors pourquoi ? Tout simplement parce que leur travail n’avait pas de sens. Au lieu d’apporter quelque chose aux autres et d’avoir une réelle utilité, il ne servait qu’à enrichir l’entreprise. Ça peut être le cas, par exemple, pour les personnes qui travaillent dans le secteur de la publicité.

Les événements traumatisants et la violence psychologique pendant l’enfance. Souvent, la victime se sent honteuse et coupable toute sa vie durant. Si elle se sent mal, elle aura tendance à ne pas chercher à améliorer sa condition ni solliciter d’aide, car, se sentant coupable, elle estime ne pas la mériter.

La peur de perdre son statut social. De nos jours, nombreux sont les travailleurs qui craignent de perdre leur emploi et de ne plus en retrouver, d’être au chômage et de vivre dans la précarité. Il peut aussi s’agir de subordonnés qui se sentent humiliés par un patron auquel il faut obéir sans se plaindre. Chez les jeunes, ça peut être le harcèlement et les difficultés scolaires qui conduisent à la perte d’estime de soi, l’anxiété généralisée et la dépression.

Le manque d’accès à la nature. De plus en plus de gens quittent la campagne pour vivre dans les villes. Ils ne côtoient plus suffisamment la nature, les arbres, les fleurs et les grands espaces calmes et verdoyants. Or, l’être humain est « programmé » pour vivre dans la nature.

La peur de l’avenir. Beaucoup de dépressifs ont perdu l’espoir que leur situation puisse s’améliorer. La perte de l’espoir peut être une cause de dépression et la dépression aggrave encore le désespoir. C’est un cercle vicieux.

Le fonctionnement cérébral. Le cerveau de certaines personnes est très réactif et plus vigilant pour détecter la moindre menace, ce qui les rend plus anxieuses et hypersensibles, donc plus susceptibles de devenir dépressives. Un déséquilibre biologique peut aussi être à l'origine d'une dépression, comme une carence en sérotonine, en magnésium, en fer, ou même une intolérance au gluten passée inaperçue… À certains moments de la vie, les fluctuations hormonales peuvent augmenter les risques de dépression chez les femmes, à l’occasion de la puberté, de la grossesse, de l’accouchement, de la ménopause…

Un terrain de fragilité génétique qui, associé à des éléments environnementaux et au vécu, peuvent augmenter les risques de dépression.

  

Que faire pour aller mieux ?

 

Il semble maintenant établi que c'est moins le déficit de sérotonine qui cause la dépression que les éléments de la vie du patient. De nombreuses recherches ont montré que le déficit de sérotonine peut rarement expliquer la dépression à lui seul. Par conséquent, les traitements qui visent à en augmenter son taux sont peu efficaces, surtout sur le long terme. Les antidépresseurs ISRS (Inhibiteur Spécifique de la Recapture de la Sérotonine) ne devraient être envisagés que comme béquille provisoire en attendant de trouver et traiter les réelles causes de la dépression, grâce à une psychothérapie, TCC par exemple, à l’hypnose, à la sophrologie ou tout autre méthode de relaxation.

Il est également conseillé de :

* Sortir, prendre l’air, aller dans la nature pour se promener ou faire du sport. La lumière du jour est indispensable pour se sentir bien. En hiver, on parle d’ailleurs de dépression saisonnière chez les personnes qui supportent mal le manque de lumière et les nuits trop longues. Dans ce cas, la luminothérapie peut être une solution. Le mieux est encore de sortir se promener dès que l’emploi du temps le permet, au moindre rayon de soleil.

* Rencontrer des gens en qui on a confiance, dont on ne se sent pas jugé et qui nous acceptent tels qu’on est.

* Penser aux autres et être dans l’entraide. S’occuper des autres est un très bon antidépresseur alors que se replier sur soi-même et se lamenter tout seul chez soi enfoncent encore plus dans la dépression. Quand on se sent mal, il faut se mettre au service des autres, même si le premier pas est difficile, à un moment où le dépressif n’a plus la force de rencontrer des gens.

* Changer de travail ou de conditions de travail. C’est malheureusement plus facile à dire qu’à faire, car cela demande beaucoup de courage et de confiance, qui font défaut en cas de dépression. Le soutien des proches est alors indispensable.

* Chercher à améliorer son sommeil et adopter une meilleure hygiène de vie, car le cerveau a besoin, comme le corps, d’exercice physique, de sommeil et d’une alimentation variée de bonne qualité, y compris de matières grasses, essentielles à son bon fonctionnement.

* Demander une prise de sang pour vérifier qu’il n’y a pas de troubles ou de carences sous-jacents : manque de fer, de magnésium ou de vitamines, intolérance au gluten, perturbation hormonale, déséquilibre du microbiote, c’est-à-dire des microbes qui composent ce que l’on nommait jadis la « flore intestinale ».

* Réorienter ses priorités : au lieu d’accumuler des biens matériels en obéissant aux injonctions de la société et de la publicité, faire des choses qui ont un sens, qui apportent quelque chose et font plaisir à soi et aux autres. S'engager dans des projets, si possible à plusieurs.

* S’éloigner des gens nuisibles qui jugent, critiquent, mettent mal à l’aise, manipulent, maltraitent…

 

Dire à un dépressif de se secouer et de faire des efforts pour aller mieux renforce son sentiment d’être incompris. Lui dire que « s’il veut, il peut » est inutile, car ne pas vouloir et ne pas pouvoir sont au cœur même de la dépression. Être dépressif, c’est ne plus avoir d’envie ni de force. Où le dépressif trouverait-il des ressources pour essayer d'aller mieux s’il est jugé et incompris par des personnes qui lui disent de se secouer ?

Pour l’aider, il faut l’accepter tel qu’il est, ne pas lui reprocher sa souffrance dont il se sent certainement honteux et coupable, lui permettre d’exprimer ce qu’il ressent, l’encourager, lui faire remarquer qu’il est déjà allé bien et qu’il n’y a pas de raison qu’il n’aille plus jamais bien. Il doit absolument garder l'espoir d'aller mieux. Sans espoir, il n’y a pas de guérison et le désespoir aggrave considérablement la dépression. Le rôle de l’entourage est donc primordial.

 

Sur ce site, vous trouverez un questionnaire d’auto-diagnostic : Cliquer ICI. 

Voici le livre de Johann HARI dont je parlais précédemment : « Chaque dépression a un sens » : Cliquer ICI.